Une fois de plus, Bernard Anton présente une création atypique. La Muse est un ouvrage de 162 pages publié aux éditions les Impliqués , qui inclut des histoires différentes les unes des autres. Ainsi, le lecteur pourra débuter où il le souhaite. Cependant, pour une expérience optimale, il convient de les découvrir dans l’ordre puisque le dernier récit est sans doute le plus poignant. Au sein de cette compilation, Bernard Anton insuffle ses thèmes de prédilection et son engagement pour la non-violence. Il n’hésite pas à s’attaquer à des tabous, aux vices d’une société corrompue…
La Muse s’ouvre sur plusieurs citations de quatre artistes, dont Natsume Sôseki, auteur japonais très réputé. D’ailleurs, Ben est un grand amateur de haïku : il a déjà publié de nombreux recueils poétiques et a même fondé le prix du Mur de l’Espoir, afin de célébrer les plus beaux haïkus. Enfin, d’autres paroles s’y ajoutent : Mozart, Picasso et Jacques Salomé. Avant de débuter, l’auteur présente son concept insolite. En effet, la conscience des protagonistes de ses intrigues se démarque grâce à l’usage de l’italique. Chaque nouvelle dans ce recueil s’ouvre par un proverbe en rapport avec l’angle choisi par Bernard Anton lui-même. Une illustration vient compléter l’ensemble, ce qui participe grandement au caractère unique de cet ouvrage. Parmi ses huit récits, Bernard Anton dépeint des situations du quotidien, en accusant les limites d’individus parfois haineux mais en célébrant également la vie.
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Le premier texte : L’au revoir présente un personnage aisé, Eva, veuve et enseignante qui s’éprend d’un élève. Mais l’avenir n’est pas aussi radieux qu’elle le songeait. L’intrigue s’assombrit, sous couvert de relations toxiques et de matérialisme. Au cours de cette première histoire, l’auteur souligne l’importance d’être en harmonie avec soi-même. D’ailleurs, le récit s’achève par un haïku. En fait, chaque texte présent dans ce livre se termine par ce type de poème bref d’origine japonaise — très apprécié et pleinement maîtrisé par l’artiste. Puisque les nouvelles sont courtes, il serait contre-productif de les raconter en détail… Cependant, elles valent toutes le détour, ne serait-ce que par le message qu’elles transmettent.
Ainsi, Tempête en avril est un récit rédigé à la première personne. Tout en introspection, le lecteur accompagne la traversée difficile de ce personnage, qui voyage dans des conditions hostiles au Canada. Alors, le narrateur est arrêté par la police. Malheureusement, un tragique accident survient, mêlant le héros à cette sordide histoire. Agacé par cette injustice, il exprime sa colère… Comment faire confiance à des institutions qui délaissent ceux qui en ont besoin ? Entre mensonges et incompréhensions, les émotions retranscrites dans le texte recèlent de vérités qui dérangent.
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En contrepartie, Bernard Anton accorde un peu de répit à ses lecteurs, qui prennent parti pour les personnages principaux. Souvent des victimes de circonstances qui sombrent dans des histoires bancales. L’artiste a toujours mis l’accent sur l’importance de l’écologie. Pour lui, il est primordial de défendre la cause animale et le respect de la planète. D’ailleurs, il a même consacré un recueil poétique à Brigitte Bardot, fervente protectrice de la nature.
Ce discours engagé est notamment abordé dans le texte intitulé Le jeu en vaut-il la chandelle ? Le lecteur apprend la décision d’Anabelle Lautrida, patronne d’une chaîne de magasins de jouets à New York. Mike Turn est un employé modèle. Alors, Madame lui remet la direction de l’entreprise. Ce dernier souhaite profiter des technologies de pointe pour créer des jouets interactifs et intelligents, rejetant la violence des pistolets en plastique, par exemple. Mais cette nouvelle façon d’entrevoir les affaires déçoit son entourage, qui n’accepte pas son progressisme. Il est pris pour cible, insulté, méprisé… Comment parviendra-t-il à surmonter cette pression ? Quelle issue, pour cet homme droit, qui privilégie l’éthique ?
Même si les textes présentent des personnages uniques, tous ont pour point commun la volonté de mettre en avant un individu qui se démarque de la norme. Un esprit révolté, qui souhaite changer son monde, souvent à la recherche d’un élément qui se trouve juste sous ses yeux. Bernard Anton signe des histoires déstabilisantes et frustrantes, tout en distillant sa poésie sublime. Cet amoureux des mots compte bien exploiter son talent pour l’écriture et cela se ressent. Le lecteur ressort déboussolé, attristé et parfois rêveur de cette expérience authentique. Finalement, La Muse s’inscrit totalement dans la bibliographie de son auteur — puisque sa plume est reconnaissable entre mille.